C’est une situation qui a basculé en quelques jours à peine, entraînant la chute, ce week-end, du régime de Bachar al-Assad. “C’est vertigineux, comme un moment iréel qui s’est vraiment produit, ça fait des années qu’on pensait à ce moment, j’ai une bouteille de champagne au frigo depuis 14 ans“, dit Hala Kodmani, journaliste franco-syrienne à Libération, qui souligne à la fois la rapidité de l’action mais aussi “le saut dans l’inconnu, qui pour l’instant n’est pas ce qui inquiète le plus le gens“.
Pouvait-on imaginer, il y a quinze jours encore, voir ce régime chuter, si rapidement et si facilement ? “Honnêtement non”, répond le journaliste Wassim Nasr, l’un des rares journalistes à avoir pu interview Abou Mohammed al-Joulani, leader de la rébellion. “L’an dernier, il me disait “on va élargir notre territoire, et ça va être bientôt”, et je n’ai pas pris cette option militaire, qui était vraiment son choix, au sérieux. Il a profité de la toute petite fenêtre de tir qu’il y a eu au moment du cessez-le-feu avec le Hezbollah, il a profité que le Hezbollah, qui tenait le front d’Alep ouest, était très fatigué, et ne s’est pas arrêté“. Il souligne tout de même que l’armée syrienne, ou en tout cas ce qu’il en restait, s’est battue. “Tous les rebelles qui étaient démobilisés, financés par les Russes, et intégrés dans l’armée, ont pris les armes“. En d’autres termes, cette action n’est pas que celle des islamistes d’al-Joulani, mais de tous les reblles qui se sont alliés pour faire tomber Assad.
“C’est un tournant historique dans l’histoire du Moyen-Orient“, souligne Hugo Micheron. “On savait que ce régime reposait sur une base extrêmement restreinte, mais on s’était accomodés à l’idée qu’il était impossible de le faire tomber“, ajoute-t-il. “Ce qui est d’autant plus impressionnant c’est que cette chute intervient après 14 mois de transformation du Moyen-Orient à une vitesse extraordinaire : on a vu une attaque d’une ampleur exceptionnelle sur le sud d’Israël, le Hamas se faire en grande partie détruire, le Hezbollah également, l’axe iranien coupé“.
