Avec en fond le final du 2e Concerto pour violon et orchestre op. 64. de Félix Mendelsohn, Nathan Milstein au violon et l’Orchestre philharmonique de New York dirigé par Bruno Walter, nous découvrons le premier 33 tours de l’histoire. C’était chez Columbia Masterworks Records en 1948.
Vous étiez alors Rosie Pinhas-Delpuech une enfant de deux ans et nous sommes à Istanbul, cette ville dont nous avons parlée la semaine dernière, ville cosmopolite et polyglotte, dans laquelle vous avez grandi entre l’allemand maternelle-non maternelle de votre mère, le français de votre père, le judéo-espagnole de votre grand-mère et le turc, votre langue de naissance.
Vous allez ainsi grandir entre les langues et les musiques, les 78 tours, puis les 33 tours et les 45 tours, qui font leur apparition en 1949.
Je crois que l’on peut dire que la musique fut la première synthèse entre l’allemand et le français de vos parents, une forme de résolution d’un conflit que provoquaient en vous ces deux langues, un conflit dont seule, écrivez-vous dans votre récit intitulé Naviguer à l’oreille, en dehors de la musique une troisième langue inattendue vous a permis vous affranchir ». J’ai nommé l’hébreu !
L’invitée
Écrivaine, éditrice, traductrice de l’hébreu, Rosie Pinhas-Delpuech est née à Istanbul et a grandi entre le turc environnant, le français de son père et l’allemand de sa mère. Elle est notamment l’auteure de Insomnia, une traduction nocturne (1998), L’Angoisse d’Abraham (2016) et Le Typographe de Whitechapel (2021), tous trois parus chez Actes Sud.
Archive sonore
La voix d’Orly Castel-Bloom
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Le livre de l’invitée
“Au fil de ce qu’elle appelle sa “traque des traces nazies infiltrées jusque dans notre espace domestique”, Rosie Pinhas-Delpuech se lance à la rencontre de Greta, la jeune femme qui deviendra sa mère, et de la langue qui les sépare : l’allemand, dans lequel Greta baigne dès son plus jeune âge, à l’école, et qu’adulte dans la Turquie d’Atatürk, elle choisit à nouveau, si attachée à son innocence d’avant-guerre qu’elle en ignore les résonances traumatiques.
Ce livre tente d’apprivoiser la distance – temporelle, linguistique, intellectuelle – entre une mère et sa fille. Et raconte comment politique et lecture précoce du monde s’immiscent dans l’esprit d’une enfant à travers la langue “maternelle” qu’elle refuse d’adopter.
Entreprise de forage et d’ouverture vers l’autre, “Naviguer à l’oreille” se déroule – dense, véloce, musical – comme la bande originale d’un voyage dans le temps où mémoire et traduction se télescopent pour tenter de renouer une conversation interrompue.”