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Juicio de Mazan: pensando en las consecuencias

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Le procès des viols de Mazan est devenu le symbole de la lutte contre les violences faites aux femmes. Droguée et violée pendant une décennie par son mari et plusieurs dizaines d’hommes recrutés sur Internet, Gisèle Pélicot n’a cessé d’appeler la société à changer de regard sur le viol. Pour ses avocats, cette affaire devra servir de testament aux générations futures.

Une absence de prise de conscience chez les accusés ?

Adèle Bossard, qui suit le procès depuis le premier jour, livre un avis pessimiste. À la lumière des réactions des accusés lors des réquisitions des procureurs, elle estime qu’ils ne semblent pas avoir pris conscience de la gravité de leurs actes. “Au moment où il y a eu ces réquisitions, on a senti vraiment un immense abattement dans la salle d’audience, raconte-t-elle. Je pense que les accusés ne s’attendaient pas du tout à des réquisitions aussi élevées [la très grande majorité des réquisitions préconise 10 à 18 ans de réclusion criminelle, NDLR]. Tal vez porque sus abogados les dijeron que podían salir libres de este juicio, que no volverían a prisión”..

Elle pointe une attitude assez décontractée des accusés, pas du tout en phase avec la gravité des faits qui leur sont reprochés. Depuis une semaine, les 50 personnes accusées sont de nouveau toutes ensemble dans la salle d’audience. Adèle Bossard décrit la scène comme une “forme de retrouvailles, des fois un peu légères, comme s’ils étaient contents de se retrouver quelque part”. Laurence Devillairs partage cette vision et évoque une “fraternité inappropriée” qui pourrait s’apparenter à une réaction de défense. Malgré cette attitude, il faut, dit-elle, éviter de “construire immédiatement des camps entre une fraternité inappropriée d’un côté et peut-être des exagérations inappropriées de l’autre”.

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Faire évoluer les mœurs

Désormais, la question centrale est moins l’inscription du consentement positif dans la définition juridique du viol que l’évolution des mœurs, soutient Véronique Le Goaziou. “Certes, la définition du viol est fondamentale pour savoir comment juger, mais il faut maintenant que la question des violences sexuelles entre dans les mœurs, dans la vie ordinaire, et c’est ce qui va prendre le plus longtemps”. Elle craint une discordance trop élevée entre une définition très précise du viol dans la loi et des représentations très décalées par rapport à cette dernière. Il s’agit à présent de “décider collectivement ce que l’on va mettre en œuvre en termes de politiques publiques, de dispositifs de sensibilisation, d’échanges, pour que la définition du viol puisse véritablement s’incarner dans des compréhensions très concrètes de ce que cela signifie dans nos comportements à caractère sexuel”.

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Quel valeur du consentement sous domination ?

Dans ce procès, Laurence Devillairs déplore la mise en lumière d’une inégalité persistante, “presque structurelle”, entre les hommes et les femmes. Dans ces conditions, l’affaire serait d’emblée une question politique et non plus simplement une affaire familiale qui devrait rester dans l’intimité du foyer. Elle observe que la manière avec laquelle les accusés se sont dédouanés révèle l’inégalité entre les sexes. Ce qui la conduit à émettre des doutes sur la notion de consentement qui serait devenu “un mot magique” à-même de résoudre les problèmes. Plus précisément, elle doute de la valeur du consentement lorsque les rapports homme-femme sont régis par des rapports de domination : “dans une situation d’inégalité, la femme n’est pas l’égale de l’homme. Donc, on s’autorise sur la femme des choses parce qu’elle n’est pas considérée comme égale. Cette situation d’inégalité sociale et politique pousse à m’interroger sur ce que vaut le consentement. Que vaut le consentement quand la femme n’est pas l’égale de l’homme ?” Pour éclairer son propos, elle fait le parallèle avec les logiques de rapports de pouvoir où l’on consent à des choses parce que l’on se retrouve dans une situation d’inégalité et donc contrainte. Dans une telle posture, le consentement n’aurait plus aucune valeur.

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Pour aller plus loin :

  • Laurence Devillairs, Ce que la philosophie doit aux femmes. L’histoire oubliée de la pensée, des origines à nos jours (co-dir.), Robert Laffont, 2024
  • Véronique Le Goaziou, Viol que fait la justice ?, Presses de Sciences Po, 2019
  • Marie Chartron, Penser les violences sexuelles, La Découverte, à paraître en février 2025

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